"Qui sauve une vie humaine sauve le monde entier »
Pendant la Deuxième Guerre mondiale, le monde entier se déchire. Partout sont les bottes des fascistes, des extrémistes qui écrasent
et massacrent.
Mais partout aussi sont les lueurs d'espoir, les lumières d'humanité allumées par les sauveteurs des persécutés.
Nous allons étudier la diversité des personnes qui furent persécutés puis ceux qui ont constitué un élan humaniste et solidaire pour
répondre à la barbarie? Nous nous interrogerons sur leurs motivations, leurs profils, leurs valeurs.
Enfin, nous exposerons comment la mémoire de ces sauveteurs est perpétué de nos jours et pourrait l'être dans les années à venir.
Il paraît important de toujours se rappeler le pire pour être en mesure de se prévenir des dangers meurtriers mais aussi du meilleur,
c'est à dire, des sauveteurs qui ont perpétué l'humanité à travers le massacre.
La doctrine nazie se fondait sur une classification raciale des hommes. Les nazis classèrent ainsi les populations en fonction de ce
qu'ils appelaient les « races à éduquer » (Latins), les « races à réduire en servitude » (Slaves, Asiatiques,
personnes de couleur) et les « races à exterminer » (juifs, tziganes, homosexuels et handicapés). Ainsi, nous étudierons
d'abord les hommes et les femmes persécutées pour ce qu'ils sont; puis ceux pourchassés pour ce qu'ils font. En effet, tous ceux dont
les actions et la doctrine ne correspondaient pas avec les critères nazis, ainsi que ceux qui s'opposèrent directement au nazisme furent
persécutés.
La première population a être persécutée fut la population juive. Il est difficile de trouver le motif d'un tel acharnement mais
cela permettait à Hitler d'imputer aux « parasites » les échecs allemands. On peut découper en deux périodes les persécutions
subies par les juifs. De 1940 à 1942, le but établit par les nazis visait à rendre les juifs si miséreux qu'ils quitteraient les
pays occupés. En effet, dés le 3 octobre 1940, un « statut des juifs de nationalité française » est promulgué par Vichy,
sans que les Allemands l'aient demandé. Ce statut instaure une discrimination de droit entre citoyens français, fondée sur la religion
et la race: les juifs sont exclus des postes de responsabilité dans la fonction publique, la magistrature et l'armée. Le 26 avril
1941, les autorités décident d'imposer aux juifs « l'aryanisation » des entreprises juives ou leur liquidation. Le 2 juin
1941, la liste des professions totalement interdites aux juifs s'allonge (banques, immobilier, publicité), le numerus clausus est
étendu à d'autres activités: médecins, élèves, universitaires. Le 12 décembre 1941, sept cent cinquante personnalités juives françaises
sont arrêtées. Toutes ces mesures ainsi que le climat antisémite rendit la vie très dure aux juifs autant sur le plan économique que
moral.
La seconde période de 1942 à 1943, débuta le 20 janvier 1942 où les nazis décidèrent de la solution finale. L'extermination des juifs,
la Shoah, fut perpétrée par la faim, les fusillades massives des unités mobiles de tueries des Einsatzgruppen, par le travail forcé
dans les camps de concentration et dans les chambres à gaz des camps de la mort. Ce génocide se distingua par son caractère industriel,
bureaucratique et systématique. Il conduisit à la mort 5,7 millions de juifs, soit 40% des juifs du monde. De plus, le patrimoine
culturel et religieux des juifs fut détruit en partie. On peut citer l'étoile jaune, symbole des persécutions, dont le port fut
imposé le 29 mars 1942 et la tristement célèbre rafle du « Vel d'hiv » le 16 et 17 juillet 1942 qui resta dans la mémoire
collective,
Le troisième Reich a aussi exterminé en masse les Tsiganes. Le terme tsigane le plus courant pour désigner ce génocide est
« porrajmos », qui signifie « dévoration ». Vichy interne les populations nomades dés 1940 par « mesure de
sécurité nationale ». Ils sont obligés de se fixer dans une commune et on parle de camps de concentration, en toutes lettres,
dans les circulaires destinées aux préfets. Pendant la Seconde Guerre mondiale on estime que entre 50.000 et 220.000 Tsiganes
d'Europe sont morts des suites des persécutions nazies. Pourtant ce n'est qu'en 1988 que la France accepta de se « souvenir »
de la politique française menée à l'encontre des Tsiganes et dressa une stèle commémorant sur l'un des sites des internements.
Les homosexuels furent persécutés par les nazis. Il faut rappeler qu'à l'époque, la condamnation pénale de l'homosexualité ainsi que son
classement dans les maladies mentales étaient considérés comme allant de soi dans de nombreux pays. Il n'en reste pas moins qu'au
temps du Reich de très nombreux homosexuels furent déportés et en zone occupée ils subirent des persécutions. En 1941, le régime de
Vichy introduisit dans le code pénal une discrimination entre homosexuels et hétérosexuels. En outre, l'âge légal de 15 ans pour
avoir des relations sexuelles avec un mineur fut augmenté de 6 ans, soit 21 ans, pour les homosexuels. Les prisonniers homosexuels
masculins devaient porter un triangle rose et les homosexuelles un triangle noir.
Le programme « Aktion T4 » est la désignation courante pour l'assassinat systématique de plus de 400,000 handicapés par les
nazis. La « destruction de vie sans valeur » commença en juillet 1939. Des stations d'euthanasie ont ét construites dans le
Reich allemand.
Les étrangers (et Français issus de parents étrangers) sont persécutés sous le régime de Vichy. Ils sont considérés, sans fondement
rationnel, comme responsable indirect de la défaite. Des réfugiés espagnols, allemands ou encore polonais composèrent les « groupes
de travailleurs étrangers » (GTE) qui travaillaient dans des camps, sans rémunération, avec des conditions de vie insuffisantes
et un contrôle restrictif. Au total, 100,000 étrangers ont connu le travail forcé en France.
Les Juifs, les homosexuels, les Tsiganes, les handicapés et les étrangers furent persécutés pour leur seule raison d'être. Étudiions
maintenant les populations persécutées pour leurs actions souvent politiques et leur désaccord affiché avec le nazisme.
La persécution contre les Résistants se généralise en 1941. Les sabotages, opérations militaires, grèves, production de tracts et
faux papiers, activités de renseignements, etc... étaient punis par la prison, la torture et la mort. La mort de Jean Moulin, premier
président du Conseil national de la Résistance, montre l'étendue des persécutions dont les Résistants sont victimes. Le 21 juin
1943, il est dénoncé et arrêté à Calluire puis meurt sous la torture.
Les réfractaires au STO (créé en février 1943) furent pourchassés par Vichy et les nazis. Ils furent prés de 200,000 dont environ un
quart gagnèrent les maquis, le reste vivant dans la clandestinité. La propagande vichyssoise annonçait « les réfractaires seront
traqués, nous emprisonnerons leurs femmes et leurs enfants, nous brûlerons leurs maisons ».
Les opposants politiques étaient pourchassés. Parmi eux des républicains espagnols, des Italiens antifascistes, des Allemands et
Autrichiens communistes. La chasse aux communistes entamée sous le gouvernement Daladier était une priorité de Vichy avant même que
les Allemands ne s'en préoccupent.
Le PCF avait été interdit sous la troisième république, en 1939, à la suite du pacte germano-soviétique. Les communistes étaient
souvent mentionnés sur les listes d'otages à fusiller en réprimande d'assassinat de nazis.
Les francs-maçons furent persécutés et 100,000 d'entre eux furent tués par les nazis. Leur attachement à la République et le fait
qu'ils soient très présents parmi la haute administration et le personnel politique de la troisième République furent la cause
de leurs persécutions.
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Les Témoins de Jéhovah pour leur refus de voter, porter les armes, faire le salut hitlérien et leur prosélytisme jugé subversif
furent pourchassé.
Également les prisonniers de guerre évadés, les soldats alliés et les syndicalistes furent des victimes des persécutions nazies.
Une grande diversité de personnes fut donc traquée par Vichy et les nazis; heureusement des personnes leur sont venues en aide. Se
demander qui elles sont c'est se demander de quelle étoffe sont faits les héros, ceux qui aident au péril de leur vie. C'est se
demander si nous serions prêts à agir de même. Nous allons donc détaillé la diversité des personnes qui sont venues en aide aux
populations persécutées. Nous nous interrogerons sur leur motivation et leur valeur. Premièrement, nous nous intéresserons
aux actions menées par les hommes d'église puis par ceux dont le métier a été un élément clé dans leur démarche solitaire.
Les hommes d'église considéraient la Résistance au nazisme et l'aide aux persécutés comme un impératif religieux. Le respect de la
vie d'autrui est une valeur fondamentale des religieux qui les a poussés à agir. Les protestants béarnais grâce à leur forte solidarité
communautaire se constituaient en réseaux. Leurs valeurs religieuses et la mémoire des persécutions dont ils ont été victimes depuis
le XVI ème les poussa à agir. Quatre pasteurs du secteur d'Orthez disposaient de laissez-passer permettant de franchir la ligne de
démarcation. Ces laissez-passer et l'aide de ce « réseau protestant » sauva de nombreuses populations pourchassées.
L'hôpital mixte de Tarbes tenu par les sœurs de la Charité accueillit de nombreux persécutés. Ils furent cachés dans les zones de
contamination où les Allemands n'avaient pas à entrer. Ceux qui ne parlaient pas le français étaient affectés au département des
sourds et muets, etc...
Les pasteurs et prêtres étaient à même de fournir de faux certificats de baptême qui permirent à de nombreux juifs d'échapper aux
camps. Des bénévoles mirent en place des organisations à vocation sociale. Parmi les organisations juives il y avait l'œuvre du
Secours aux Enfants et les Éclaireurs israélites de France. Parmi les organisations chrétiennes et laïques: l'Amitié chrétienne et
la Commission inter mouvements auprès des évacués qui accordait une aide matérielle et morale aux populations déracinées vivant
dans des conditions précaires; aidait également aux évasions et passages clandestins. Enfin, le Secours national français qui
promouvait et coordonnait les initiatives de charité en faveur des réfugiés et victimes de persécution.
Certaines personnes, de par leurs fonctions, ont été amenées à commettre ou voir des atrocités. Ceci les révolta et leur fit adopter
le camps de ceux qui sauvent et aident les persécutés. Les policiers et les gendarmes pouvaient prévenir des rafles et arrestations
sauvant ainsi des camps et de la mort. Les maires et fonctionnaires des administrations locales avaient les cachets et tampons
encreurs originaux permettant la confection de faux papiers. Les diplomates comme Aristides de Souza Mendes étaient en position
pour fournir visas, faux papiers et contacts
Les postiers pouvaient intercepter les informations, transmettre des messages qui ont soutenu moralement de nombreuses familles, des
graveurs pour aider à la production de faux papiers.
Les gardes champêtres pour récupérer les parachutistes tombés du ciel: les patrons ou personnes travaillant à leur compte pouvaient
employer des juifs et leur donner ainsi un salaire nécessaire à leur survie.
Enfin des particuliers nourrirent, logèrent, adoptèrent des enfants pourchassés. Ils cachèrent les bijoux des familles ou les
vendirent. S'occupèrent des transactions de leurs biens afin de leur procurer des moyens financiers de subsistance. Achetèrent
fictivement leurs biens afin d'éviter leur « aryanisation » ce qui sauvait leur patrimoine.
Rappeler la diversité des gens qui ont secouru les personnes persécutées permet de rappeler que chacun avait la possibilité d'aider
et de reconnaître à leur juste valeur l'héroïsme de ces gens hors du commun. Car si tous avaient la possibilité d'aider c'est environ 3%
de la population française qui l'a fait. Comment la mémoire de ces personnes hors du commun est-elle perpétuée de nos jours.
Commençons par présenter le titre de « Juste parmi les nations ». Emprunté à la littérature talmudique c'est un titre
attribué par le mémorial Yad Vashem (Jérusalem) aux non juifs ayant aidés les Juifs (sans contre-partie financière) 2.725 Français
sont aujourd'hui considérés comme tels bien qu'il semblerait que de nombreuses personnes aient également œuvré pour la survie des
juifs persécutés. Par modestie ou car leur nom était gardé secret par mesure de sécurité il est difficile de connaître leur
identité. Les « Justes » reçoivent la médaille des Justes et un certificat honorifique; de plus, leur nom est inscrit
sur le « Mur d'honneur » à Yad Vashem. C'est la plus haute distinction d'Israël. Il est très important pour la
communauté juive d'effectuer cette reconnaissance à titre de remerciement et pour inscrire dans l'Histoire qu'il était possible
d'aider les Juifs à échapper à la « solution finale » malgré le danger nazi. Ce comité perpétue la mémoire des Justes
par divers moyens. Il existe la possibilité par Internet ou par papier de constituer un dossier pour faire reconnaître ceux qui ont
sauvé des Juifs. De plus, le comité publie des travaux universitaires, organise des expositions itinérantes qui font parfois escales
dans les écoles. Il existe un « dictionnaire des Justes de France » préfacé par Jacques Chirac, qui expose une galerie
de portraits. Le comité agit aussi au niveau internationale. En 2005, à l'occasion du 60 ème anniversaire de la libération d'Auschwitz,
une plaque a été dévoilée dans une synagogue à Prague en hommage aux familles ayant caché des enfants juifs pendant la guerre.
La mémoire des personnes ayant aidés des persécutés est transmise aux jeunes générations à travers les récits des survivants et
témoins de la Shoah. Ces récits émouvants, personnels touchent les élèves et ancrent en eux le souvenir de la Shoah et de ceux qui
ont tout fait pour la limiter. Malheureusement, les témoins ne sont pas éternels. Les nouvelles technologies comme Internet sont des
outils pouvant perpétuer le souvenir. L'exemple du site de Monsieur Jolit sur lequel des élèves peuvent travailler et se documenter
est intéressant. La vidéo également commence à prendre le relais des témoignages et permet aussi de perpétuer le souvenir de très
longues années.
Moins formellement le cinéma a sa place dans le devoir de mémoire. Le film « Au revoir les enfants » commémore les actions du
Père Jacques a permis à un large public d'être sensibilisé. Le cinéma peut être associé à des conférences après le film qui décrypte
et explique en profondeur la réalité historique. Cela se déroule par exemple lors de festival de l'Histoire.
Les livres depuis le plus jeune âge jusqu'à des romans plus durs permettent de livrer le souvenir des femmes et des hommes qui ont
sauvé des gens de la tourmente. La fiction permet de rappeler à la mémoire collective le rôle des sauveteurs. Les associations de
Résistants et d'historiens publient des journaux commémoratifs, organisent des cérémonies et des concours pour sensibiliser les
jeunes, les encourager à enquêter sur les sauveteurs de leur région. Enfin, il existe des commémorations plus formelles telles
que des plaques, des noms de rue, de place et des distinctions décernées par l'État.
La mémoire de ceux qui ont aidé les persécutés est donc perpétuée. Néanmoins, on remarque qu'elle l’est moins que d'autres acteurs
de la Résistance. Ainsi les cérémonies officielles privilégient les actions plus « spectaculaires » comme un Résistant
faisant exploser une réserve d'armes allemandes. Il ne semble pourtant pas moins patriotique et honorable de sauver une vie que de
repousser l'envahisseur.
Il est donc nécessaire de rappeler l'importance des valeurs humanistes et des grandes qualités de cœur des sauveteurs souvent oubliés
par les exploits belliqueux et autres actions de résistance. Chaque aspect de la Résistance est à célébrer et à honorer.
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